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    CR Les Templiers par Thierry Dehais

    Foued
    Foued
    Admin


    Messages : 777
    Date d'inscription : 28/07/2009
    Localisation : Paris

    CR Les Templiers par Thierry Dehais Empty CR Les Templiers par Thierry Dehais

    Message  Foued Mar 27 Oct 2009 - 0:55

    Salut à toutes et à tous, CR Les Templiers par Thierry Dehais Affraid
    Vous allez vous régaler, ci-dessous le compte-rendu de Thierry Dehais CR Les Templiers par Thierry Dehais Icon_sunny qui a participé au dernier Templiers. CR Les Templiers par Thierry Dehais Icon_basketball

    Après une préparation « sauvage » et écourtée due à ma volonté de tout stopper suite au raid du golfe
    où l’aventure s’était arrêtée vannes, pendant 2 semaines, je visite sans cesse le site des templiers, semblant jouer à « plouf plouf, ira-ira-pas aux templiers »…puis en raisonnant (oui, cela peut m’arriver une fois l’an), je me dis que si je n’y participe pas, les remords feront leur apparition, j’y tiens à mes chers templiers, mais surtout grâce aux encouragements de Pascal et de toutes les émotions et moments passés avec les membres de mon club, je décide de participer finalement aux Templiers. (Sans le club, il n’est pas certain du tout, mais alors, pas du tout, que j’aurai remis le pied à l’étrier).

    Nous partons (avec Stephane, un copain) de Rennes, jeudi matin à 7 heures : voyage tranquille où durant le
    voyage, je me prends même à photographier mes converses avec le portable et le pont de Millau sous la pluie. Et oui, c’est sous la pluie que nous irons récupéré nos dossards, n°10 pour moi, « mélancoliques ruines des siècles révolus »… mais, discussion avec plein de copains que je retrouve : super, génial ! Les résultats restent des chiffres, les vrais potes, des mots qui font chaud au cœur…

    Nous nous rendons à la chambre d’hôtel située à 200m du départ ouahhhhh ; en plus, sas élite, super pour demain, hébergement très bien. Mon compagnon de route et moi décidons d’aller boire une petite mousse (oui, ça aussi, ça m’arrive, bon ok, un peu plus qu’une fois l’an…) et de marcher un peu, histoire de se détendre.

    Nous passons à nos ultimes préparatifs, puis nous couchons de bonne heure : 21 heures, tout feux éteints.

    Réveil à 2h30 mais oulala, le cardio affiche 80 puls couché et 100 debout : la crève, quand tu nous
    tiens… , je sais donc déjà que ça va être dur. Cependant, des SMS d’encouragement m’arrivent dès 3 heures du matin : ça fait plaisir.

    Je ne parviens pas à me décider pour l’alimentation et là je commets une erreur (que je paierai plus tard bien
    sûr, sinon j’aurai évité de la commettre…) je vais emporter 500 grs inutiles de gels et barres (que d’énergie gaspillée).

    Je quitte la chambre à 3h50 pour un départ à 4 heures (d’où l’intérêt du sas) : vérification du matos, un petit mot de Gilles Bertrand toujours aussi sympa…

    Et attention, Top Départ, c’est parti mon Titi : une folie, je me fais doubler de tous côtés, et mon cardio m’ordonne de ralentir encore car mes fréquences n’ont, bien entendu, pas diminuées, on est maintenant dans la réalité, plus dans les élucubrations.

    On attaque la première partie en montée douce mais là, je ne ressens que des douleurs un peu partout et non
    content de ne doubler personne, c’est l’inverse qui se produit, mais philosophe (alors, ça, en général, ça ne m’est arrivé qu’en terminale quand je me prenais une veste avec des filles…), je me dis que tôt ou tard, j’arriverai bien à aller mieux dans un moment.

    Au final de cette étape, j’atteins Sauclières en 1h38, je ne connais pas ma place mais je l’estime dans les 150 et je commence à positiver car, c’est top, je n’ai pas vu le temps passer !

    Là, on attaque la montée de Saint Guiral et me décide donc à monter mes bâtons : j’avoue que l’idée
    de ces derniers fut l’une de mes meilleures car ils ne quitteront plus mes petits doigts musclés (faut bien l’être encore quelque part !), ancrés aux deux mains pour les montées et à une seule pour le plat et les descentes.

    Nous écopons, au niveau météorologique d’une température plutôt fraîche, d’un petit vent, de brouillard,
    et pour me rappeler mes racines, d’un crachin breton : les conditions sont donc réunies pour avancer convenablement sauf pour le brouillard, je n’avais pas prévu de couteau (ouaip, je ne fais pas partie de ses hommes qui dans la vie font avec leur b… et leur couteau hum) et j’avoue que j’ai bien failli me perdre une ou deux fois mais bon plus de peur que de mal.

    Descente sur Dourbies, où, le jour s’étant pointé, tout va déjà mieux : ravitaillement, je suis calme et serein d’autant que je suis complètement dans les temps que je m’étais fixés. Je bigophone ma petite femme avec laquelle j’aurai une conversation à chaque ravito à partir de ce moment ( ça fait du bien à tout le monde sauf les fois où ayant emprunté son portable, je « me suis tapé des correspondants qui cherchaient à la joindre…et je vous garantis que décrocher en plein effort, voire en plein doute et souffrance, à des interlocuteurs importuns ce jour-là, c’est raide…résultat, ils se seront retrouvés « interlocutés » sans aucun remord mdrr).
    Bref, je quitte le ravito en 4h10 soit en 60ème position.

    Allez, maintenant il s’agit d’attaquer la partie que j’avais programmée comme étant la plus dure avec la
    montée sur Prat Preyrot et la montée de Dourbie, mais en fin de compte , celle-ci va se révéler relativement facile en raison d’un dénivelé régulier. La suite est une portion agréable avec le jour mais très froide et avec beaucoup de vent. Je rejoins la station de ski après 6h30 de course ( km 57), en bonne forme , lucide, bref, bien.

    A ce moment-là, je suis 28ème, (un moral gonflé sachant que théoriquement la section suivante est la plus facile et qu’il ne s’agit que de gestion de course). Je me change (naaaaaaan, je mets pas ma tenue de ski…) car les conditions au sommet du Mont Aigoual sont assez difficiles, très fort vent avec un thermomètre qui affiche seulement 2 °C et, comme de fait, arrivé au sommet, avec le vent , j’étais scotché au bitume (à la limite de reculer, je n’arrivais plus à respirer), puis attaque de la descente sur Camprieu que je croyais facile mais la je me suis ramassé plein de gros tape-cul où on laisse une énergie phénoménale, en plus, quelle que soit la direction dans laquelle je regarde, je suis tout seul, c’est long…………..Alors, je me dis, « Bah petit
    Gars, tu va en baver ».

    Je rejoins cependant Camprieu (superbe section avec des passages de cascades eten sous-bois magnifiques, mais il n’y a même pas une fille à se baigner sous la cascade, comme quoi, je suis toujours lucide héhé) : km 70, 7h45 de course, toujours calqué à mes prévisions. Je re-bigophone ma femme mais là, je lui annonce que ça va être dur pour moi : je sens la grosse baisse de régime malgré tout, et même si je suis pointé à la 25ème place, je sais que ça ne durera pas mais aujourd’hui, ce n’était pas l’essentiel.

    Je quitte donc le ravito en marchant : c’est le début de mon chemin de croix (heureusement que j’avais mes bâtons…de pélerin, on se sent moins seul oui,oui) car Le Larzac sans voir quiconque c’est pas top ! Enfin , je me dis « avance, il y en a d’autres qui sont pas bien non plus ». C’est en abordant la descente sur Treves que les souvenirs qui font mal affluent et ne me quitteront plus : en effet, aujourd’hui, la descente ne se fait plus à la même vitesse, ni même avec les mêmes idées en tête. Il faut bien se rendre à l’évidence, qu’elle fasse mal ou non : le Titi n’est plus celui qu’il était mais il faut achever ce chemin de croix pour reprendre le dessus et revivre ces souvenirs…

    Ravito à Treves en 22ème
    position
    et 10h15 de course, là j’ai compris depuis longtemps que mes prévisions ne sont plus les bonnes…
    J’essaie de faire une micro-sieste, je bois et surtout, je prends mon temps : du coup, je me fais doubler et redoubler…la descente aux enfers commence. Je quitte le ravito 26ème après un dernier réconfort de ma petite femme et de mon petit frère (ne rougis pas, marathonien et compagnon de toutes mes routes, je sais que tu sais que je parle de toi…)

    Désormais, je ne penserai plus qu’à une chose : a-v-a-n-c-e-r (ce qui, pour moi, déjà, est un exploit, étant
    mec et blond) en rampant, sur les mains, avec les dents s’il le faut, peu importe, mais avancer. Alors, je ne vous explique les états par lesquels je suis passé, tant physiquement que moralement, entre le front qui se met d’un coup d’un seul à littéralement ruisseler, la tête qui ne veut plus rien savoir ou les jambes qui deviennent dures comme du bois.

    J’arrive tant bien que mal (surtout mal) au dernier ravito à Revens, en état d’hypoglycémie complète et, je pense que mon étoile m’a suivi pour qu’il n’y ait pas de médecin à ce moment-là (« le cœur a ses raisons……. »), toujours en 26ème position mais je savais qu’un petit groupe arrivait, les ayant aperçu au loin. Je bois du thé, je mange du fromage puis rappelle ma femme à laquelle j’annonce que je ne peux même plus marcher, que dans ces conditions, c’est l’enfer mais que je vais finir : « j’arriverai quand je pourrais mais je finirai (pas comme au golfe, non tout, mais pas ça !) ». J’en avais les larmes aux yeux à ce moment-là.

    Une fois raccroché, j’ai de nouveau mangé et bu puis, je suis parti mais là, gros problème : une marche à descendre qui m’oblige à m’agripper au montant pour la passer, puis s’ensuivent environ 500m qui me sont parus interminables où la volonté d’essayer de courir tant mes cuisses étaient douloureuses ne pouvait plus prendre le dessus. Là, en toute franchise, j’ai songé à tout arrêter mais dans le brouhaha de la souffrance, une petite voix s’est faite entendre : « tu le regretteras…continues… » ; j’ai caressé le collier de ma femme et comme par miracle, tout a disparu, je me suis mis à courir comme un lièvre, à sauter comme un cabri…………………pfffffffffffffffffff, n’importe quoi, le miracle a juste (et c’est bien suffisant) fait que je suis parvenu à mettre un pied devant l’autre et encore…Pendant ce temps-là, 4 coureurs sont passés mais
    c’est devenu vraiment annexe.

    Je connais (hélàs…) la fin duparcours par cœur et je sais donc en connaissance de cause que je vais souffrir : une grosse descente technique et une autre, finale, plus facile avec une gentille montée au milieu.

    Comme pressenti, cette descente est un véritable supplice, où tout obstacle minime devient une incroyable muraille a passer, je me suis même mis à penser que je préférais les montées aux descentes (moi, le Titi qui, d’habitude, exulte littéralement tant en descente).

    Contre toute attente, une surprise va me requinquer un tant soit peu sur le bas de la descente : je rattrape, dans une montée avec mes bâtons, un gars qui m’avait doublé au ravito ; une fois à sa hauteur, après un échange du regard, je lui déclare : « on s’aide jusqu’au bout ! ». Ainsi, dans toute la montée sur Nant, il s’est accroché à moi, on était comme deux frères alors que 2 secondes avant on ne se connaissait même pas. Nous avons alors abordé la descente finale qui fut pour moi terrible n’ayant plus de lumière et que la nuit tombait vite.

    Nous atteignons enfin le village au bout de 15h14 et là, ensemble, on a marché, simplement marché pendant toute la traversée de Nant en discutant, en appréciant tout ce qui venait de se passer : moi , j’étais plus mort que vif, je tremblais de froid, j’étais pris de terribles nausées, et d’ailleurs, je pense que je devais faire très peur…pour vous dire, j’ai un trou de mémoire : je ne sais même plus à qui j’ai parlé au téléphone ni même ce que j’ai bien pu raconter au micro…

    Puis, j’ai vu Eric accompagné de ses copains, je ne pourrais pas vous dire non plus de quoi on a parlé (certainement de la course mais je n’en suis même pas sûr). J’ai essayé ensuite de récupérer au ravito final mais c’était devenu impossible, j’ai vu ma copine Coco (une bonne marathonienne…2h28 mais surtout une sacrée compagne d’aventures sportives), on se donne rendez-vous au café de l’hôtel une fois que je serai propre !!!!!!!!!!!!!!!

    J’arrive à l’hôtel mais la douche, même looooooooooooongue et bouillante, ne me réchauffe nullement alors je me mets au lit avec 2 pulls, grelottant, nauséeux, mal… mais le téléphone me ramène un tant soit peu à la vie : « et oui petit gars, t’avais donné rendez-vous ». Je descends donc au bar, avec mon air de zombie, sans
    aucune volonté de manger mais Coco m’invite à table avec Laurence Klein et Dominique Chauvelier qui se sont bien moqués de moi : à leurs yeux, j’avais l’air shooté !!!

    Nous sommes ensuite allés attendre mon compagnon de route, Stéphane, qui terminera en 19h34 mais qui,
    lui, aura eu moins de chance que moi, ayant croisé un médecin lors de son hypoglycémie…et notez, siouplaît, que Monsieur mon copain a passé 4h de périple dans la nuit pour terminer : chapeau ! et Merci de ta compagnie pour ce we, Stéphane.

    Au final, aucun remord dès l’inscription aux templiers et aucun regret à l’arrivée : je n’ai pas vaincu l’endurance trail mais j’ai vaincu le souvenir du raid du Golfe et surtout, je me suis vaincu…j’en pleure encore en écrivant ces lignes…

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